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Question grammaticale

Envoyé par Francis Marche 
25 mars 2013, 14:52   Question grammaticale
Question grammaticale soumise à l'assemblée, objet d'une forte controverse dans la communauté des traducteurs en ligne. Comment faut-il entendre "le sont" dans la phrase qui suit ?

Cette problématique du mélange de bases représentait un excellent exemple d’application de techniques de contrôle multi-variable non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés le sont.

Les "bases" que l'on mélange sont des produits chimiques, le domaine est celui de la raffinerie du pétrole. La question est de grammaire (et même gramatologique!); elle ne s'inscrit pas exclusivement dans une problématique technique du domaine considéré.

Voici le lien, renvoyant à la page du site proz.com où cette question a été mise en débat, les interventions ayant eu lieu en anglais ; ces échanges (assez vifs) peuvent être consultés dans les réponses de chacun (et les commentaires contradictoires qu'elles suscitent) mais aussi dans les "discussions" en chapeau, [www.proz.com]

Merci à tous ceux qui voudront apporter leurs lumières à ce débat. J'aimerais que ceux qui prendront la peine de donner ici leur avis le fassent avant de se rendre sur la page proz.com, pour, face à la phrase ci-dessus, interroger leur sentiment de la langue à son plus brut (qui est aussi son plus pur !), si je puis m'exprimer ainsi.

C'est un autre paradoxe moderne: la dégradation générale des copies rédigées en français oblige à une interrogation "en profondeur", de plus en plus subtile, de son sentiment linguistique, éclairée par la grammaire formelle.
25 mars 2013, 15:24   Re : Question grammaticale
Je ne comprends pas grand-chose à ce jargon mais je relie spontanément "le sont" à non-linéaire, le dernier qualificatif employé.
Merci Marcel. Selon vous ces lois d'additivité des propriétés sont aussi "non-linéraires" que peut l'être le "contrôle multi-variable" qualifié tel en amont. Vous ai-je bien compris ?
25 mars 2013, 15:53   Re : Question grammaticale
C'est ce que la phrase me semble dire en effet, mais ne me demandez pas ce que cela signifie — ni si cela peut avoir le moindre sens d'ailleurs.
Cette problématique du mélange de bases représentait un excellent exemple d’application de techniques de contrôle multi-variable non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés le sont, problématiques.

Les lois d’additivité des propriétés seraient-elles problématiques ?

(Sinon, je ne vois pas à quoi sert le mot problématique dans cette phrase).
25 mars 2013, 18:24   Re : Question grammaticale
L’interprétation de M. Tascius, qui transforme un substantif en adjectif, ne saurait, selon moi, être soutenue. Je souscris pour ma part à la lecture meyerienne, qui est la seule à tenir debout grammaticalement (et elle a du mérite dans cette bourrasque). Un vague soupçon m’habite toutefois d’après lequel les lois d’additivité seraient des techniques de contrôle multi-variable non-linéaire — en ce cas il aurait fallu en sont.
Je comprends quant à moi que les lois d’additivité des propriétés sont à la fois multi-variables et non-linéaires et qu’elles appellent par conséquent l’application des techniques de contrôle idem. Mais avec une phrase pareille, on ne peut rien faire.
Utilisateur anonyme
25 mars 2013, 19:02   Re : Question grammaticale
Je propose de copier-coller la google translation sans rien altérer de la qualité de la syntaxe : le sens sera clair (uniquement) pour les spécialistes des deux bouts.

Récemment une médaille Fields a été accordée pour un travail sur les Chtouka de Drinfeld. «In Russian, the word "shtuka" is also used as a slang describing a thing with known properties, but having no name in a speaker's mind.»
Cette problématique du mélange de bases représentait un excellent exemple d’application de techniques de contrôle multi-variable non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés le sont.

Les bases, à prendre dans le sens acide-base (la soude est une 'base' qui neutralise les acidités de l'estomac)

Cette problématique du mélange de plusieurs acides/bases représentait est un excellent exemple d’application de mise en œuvre de techniques qui, d'une part, font intervenir de multiples variables, et d'autre part, ne sont pas linéaires. Et ceci, parce que les lois d’additivité des propriétés des acides-bases le sont : non-linéaires et à variables multiples.
La première partie de la phrase est du charabia. On est en droit de se demander en quoi le fait de mélanger des bases constitue une "problématique". Peut-être est-ce source de "difficultés", mais c'est une autre question.

La seconde partie (la causale) est incorrecte d'un point de vue syntaxique. Le pronom "le" devant le verbe être ne peut représenter, dans cette "fonction" d'attribut du sujet, qu'un adjectif ou un nom employé adjectivement (sans article donc : si cela avait été "sont des techniques", c'est, comme ccela a été dit, "en" qui serait apparu devant "sont").
Pour que la construction ait un sens, il faut que l'adjectif (ou le N employé adjectivement) que représente "le" ait été employé dans la principale ou dans le fragment de phrase qui précède. Dans "cette problématique du mélange de bases représentait un excellent exemple d’application de techniques de contrôle multi-variable non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés le sont", les seuls adjectifs pouvant être représentés par "le" sont "multivariable" et "non-linéaire", mais ils déterminent "contrôle". Il aurait fallu écrire, pour que la phrase soit correcte et ait un sens grammatical (pour ce qui est des techniques de contrôle, je ne me prononce pas) : "les lois d'additivité... sont, comme ces techniques de contrôle, multivariables et non-linéaires, donc répéter les adjectifs et les mettre au pluriel.

Il semble que cette phrase "française" résulte de la traduction par une machine d'une phrase chinoise ou allemande. Le mieux, comme cela a été suggéré, serait de demander à la même machine de traduire en anglais cette "phrase"... La phrase obtenue en anglais sera de la même eau que la phrase en français, mais en anglais, il se peut qu'elle ait un sens.
25 mars 2013, 22:20   Re : Question grammaticale
C'est aussi mon avis : les lois d'additivité étant multivariables et non linéaires, elles appellent donc le même type de contrôle.
Beats me en quoi consisterait précisément un contrôle multivariable et non-linéaire, mais c'est pas nos oignons ; cela étant, nous savons tous que les propriétés du tout différent des propriétés de chacune des parties le constituant, donc ça devrait coller.
Je propose donc à Francis de traduire cette phrase en un anglais correct dans ce sens, plutôt que de la rendre au petit bonheur la chance par téléphone arabe.
Débat très intéressant.

Il me semble que ce texte s'adresse à des spécialistes, c'est un texte technique, écrit avec une grande économie de moyens. Au départ, je pensais qu'il n'y avait pas de problème et que le sens était clair, puisque, pour moi, les lois d’additivité des propriétés sont linéaires et donc le sens évident.

J'ai ensuite découvert la discussion, et que des lois d’additivité des propriétés pouvaient être non-linéaires, ce que je n'avais pas présent à l'esprit (je suppose que ce débat est obscur pour certains, ils devaient quand on parlait de lois d'additivité en électricité en être restés à la loi des noeuds).

J'aurais bien vu écrit : multivariable (non linéaire).
Le sens général des interventions sur le forum serait donc :

Cette problématique du mélange de bases représentait un excellent exemple d’application de techniques de contrôle multi-variable non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés ne le sont pas (linéaires).

En fait, pour moi, "le" reprend "linéaire" et non non-linéaire (quoique non non-linéaire veuille aussi dire linéaire, je présume).
25 mars 2013, 23:29   Re : Question grammaticale
Vous avez raison, c'est "non linéaire"... mais ce qui est repris, à mon sens, c'est toujours la "non-linéarité" de la chose, sinon on n'y pige vraiment plus que pouic...
Bien. Messieurs, je suis "fort impressionné" comme disent les Anglais, par l'érudition autant que par l'implacable rigueur que vous avez mobilisées pour vous pencher sur ce cas digne d'un atelier wittgensteinien.

Tous mes collègues anglophones pensent comme la majorité d'entre vous et donnent de cette phrase une interprétation meyerienne, à savoir que les "propriétés additives sont non linéaires". Seul Du Masneau semble ici disposé à partager ma lecture, opposée à la leur, à savoir donner à ce "puisque.... le sont" le sens d'une emphase d'opposition à la non-linéarité déclarée en amont et donc celui d'une affirmation positive, d'un rappel, devrait-on dire de la linéarité des propriétés additives.

Mon sentiment personnel était que si ces propriétés additives étaient non-linéaires, la phrase eût fini par le sont aussi. Je supposais vaguement en outre que la linéarité de ces propriétés pouvait se comporter de manière neutre dans tout procédé de mesure, ou de contrôle, de données non-linéaires, d'où leur intérêt pour l'expérience scientifique, et que le texte tenait pour acquis la linéarité principielle de ces propriétés, acquis et principe marqués dans le texte par ce "puisque.."
Mais j'étais tout disposé à me rallier à l'avis général quand, par acquis de conscience j'ai googlé, pour en quantifier les occurrences sur la Toile, les deux termes suivants:

"linear additive properties"
et
"non-linear additive properties"

Je fus surpris de constater que "linear additive properties" donnait 574 occurrences, cependant que "non-linear additive properties" n'en livrait que quatre (04) qui n'en faisaient qu'une puisque toutes quatre issues d'un même texte.

Ce déséquilibre dans les occurrences indique (à 574 contre 1) que les dites propriétés additives sont toujours linéaires, ce qui tend à corroborer, et même confirme amplement, la thèse opposée à celle qui s'exprime majoritairement, la thèse juste, à savoir que le texte tient pour évidente la linéarité de ces propriétés et que ses auteurs s'appuient sur elle pour opérer des mesures, isoler des caractéristiques, de système non linéaires.

Qui a raison ? Qui "lit correctement" ? Je ne suis nullement prêt, en dépit de ce que "la science" nous dit éloquemment, à affirmer que ce soit moi. Le texte est doublement faux -- il dit si faussement ce qu'il dit mal que la vérité en devient lisible par transparence aux seuls esprits habités du parti pris de lire indirectement et autrement ce qui est écrit! Il ne se révèle qu'aux seuls esprits rompus à supposer le faux. J'ai raison, mais j'ai tort de lire si mal ce qui est si faussement écrit pour y trouver la vérité. Ma démarche est si fausse que la vérité que j'y trouve n'en est que conjoncturelle, qu'accidentelle et non généralisable. Cette vérité ne peut être partagée. Elle est sans loi, hors-la-loi.; elle est le fruit stérile et isolé du faux.

L'enseignement devrait en être politique.

[message corrigé et modifié]
26 mars 2013, 03:54   Re : Question grammaticale
Si j'ai bien compris, il s'agit ici du mélange de produits chimiques, et des propriétés obtenues par ce mélange — par opposition, c'est l'hypothèse la plus probable, aux propriétés de chacun des produit considéré isolément ; en l'occurrence, les "lois d'additivité" doivent être celles qui décrivent les propriétés du mélange obtenu par l'addition de produits différents.
En quoi ces lois peuvent-elles être "non linéaires" ? je vais vous donner, cher Francis, un petit exemple de derrière les fagots : soit une membrane traversée par de l'eau et des substances dissoutes auxquelles cette membrane est inégalement perméable ; eh bien, la connaissance des flux de transport de chaque espèce moléculaire isolée ne permet pas du tout de "prédire celle de toutes ces espèces ensemble, si l'on ne dispose pas du système d'équations qui en décrit les comportements couplés. Or ce système d'équations comporte des solutions étonnantes, c'est à dire imprévisibles, contre-intuitives au sens commun avant de faire le calcul, qui n'est lui-même faisable, à la façon d'une expérience, qu'au coup par coup." (H. Atlan, Connaissance scientifique et niveaux d'organisation, dans La Règle du jeu)
Aussi, les effets du mélange des substances sont "contre-intuitifs par rapport à ce que le bon sens des additions linéaires aurait suggéré" (ibid.).

La voilà, votre "non-linéarité" des lois d'additivité de substances chimiques diverses !


D'après les partisans de la linéarité des lois d'additivité, donc, la phrase correctement formulée devrait être : Cette problématique du mélange de bases représentait un excellent exemple d’application de techniques de contrôle multi-variable non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés sont linéaires...

Je dois dire que tel quel, cela me semble assez abstrus ; l'on doit surtout en conclure qu'une méthode de contrôle d'un processus doit avoir pour caractéristique principale de procéder à l'inverse de son objet (elle doit être "non linéaire" quand le processus lui-même est décrit par des lois "linéaires"), et ma foi, l'on se demande bien pourquoi : pourquoi, grands dieux, contrôler de façon non linéaire ce qui est censé se dérouler de façon simplement linéaire ???
Alain, je crois que vous inversez les termes entre l'instrument de mesure et la chose (le processus) à mesurer:

on souhaite mesurer, contrôler, connaître, un dispositif fait de plusieurs variables au comportement (additif ou autres) posé comme non linéraire ("multi-variable non-linéaire" doit s'entendre ainsi);

pour ce faire l'on doit disposer d'une aune, d'un instrument de mesure qui présentera la caractéristique opposée, et il n'y a rien à cela que de très logique et intuitif: pour mesurer la célérité d'un corps ou d'un système en mouvement, l'on doit user d'un système tiers (constitué par exemple de deux points) qui devront être fixes; il s'agit d'une nécessité empirique (qui devrait être assimilable au rasoir d'Occam -- de pas démultiplier les inconnues). Pour prendre la mesure des déformations non-linéaires d'un système élastique, il est nécessaire de disposer d'une règle, d'une baguette, d'un bâton ou d'un gnomon parfaitement rigide, qui sera neutre au mouvement, en relativité zéro à ce dernier, et qui le rendra mesurable de manière localement absolue.

Les propriétés du processus et celles de l'instrument de sa mesure doivent être contraposées.
linéaire est ici à prendre au sens mathématique du terme, c'est-à-dire, répétable.
Le processus se définit en fonction de ses conditions initiales (qui peuvent être multi-variables) et il produit toujours le même résultat (la répétition du résultat, autrement dit, la linéarité).

Il m'est venu une interprétation qui peut faire sens (pour autant qu'il soit possible de faire sens avec cette phrase):
puisque les lois d'additivité des propriétés des acides/bases sont linéaires, alors, le contrôle (du processus), lui, au contraire, sera multi-variable non-linéaire, autrement dit, il sera aussi 'étendu' que possible de façon à contrôler même les cas les plus improbables ou imprévus.
Dans ce cas,
les lois d’additivité des propriétés sont multi-variable et/ou linéaires
le contrôle est multi-variable non-linéaire
non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés le sont.

J'avoue avoir un peu de mal avec cette discussion.

Je ne peux pas comprendre cette phrase autrement que :

non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés sont linéaires.

Si on avait voulu dire :

non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés sont non linéaires

on aurait de mon point de vue dû écrire :

non-linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés ne le sont pas.
Dit autrement, "linéaire" est complété dans le premier segment par "non" et dans le second représenté par "le".

Prenez la phrase symétrique :

linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés ne le sont pas.

Il est évident que le continue à représenter linéaire, donc dans ce cas le second membre est "non-linéaire".

linéaire puisque les lois d’additivité des propriétés sont non-linéaires.
Cher Du Maseau,

l'état d'incertitude est l'état démocratique par excellence: la minorité doit se ranger à la certitude de la majorité. Ce n'est pas une boutade: la vérité mathématique n'est pas aristocratique; une part de sa difficulté, ou de sa facilité tient à sa soumission à la majorité, à la commonalité des hypothèses et des acquis de conscience: la masse le veut, donc c'est. Atteint le cercle, ou le seuil, de l'incertitude, l'idiot démocratique est le maître mathématique par excellence: la masse, un peu comme en physique, est raison.
Francis,

A Siem Reap, vous êtes à mi-chemin de l'Australie.

Pour vous mettre du baume au coeur, je vous dirai qu'en Australie il y a vingt millions d'Australiens et deux millards de lapins, ce n'est pas pour autant que les lapins commandent.
Utilisateur anonyme
26 mars 2013, 14:57   Re : Question grammaticale
Citation
Francis Marche
...la vérité mathématique n'est pas aristocratique... la masse le veut, donc c'est...

Propriété d'une science dure : un seul peut avoir raison contre tous.

Mais ici on parle de chimie je crois, où ça touille et ça fait des couleurs.
26 mars 2013, 15:34   Re : Question grammaticale
Il va finir par devenir non-fumeur puisque tous les membres de son entourage le sont.

Phrase peu élégante mais où "le sont" renvoie évidemment à "non-fumeurs" : il est donc possible d'accoler un relatif positif à une un groupe nominal négatif.
Cher Marcel,

votre dernière proposition pourrait être convaincante, hélas elle porte sur une relation de causalité: le sujet réagit à une variable connue, non modulable, parfaitement discrète: l'entourage qui fume et ce puisque vaut un donc. Dans l'hypothèse d'une procédure scientifique où sont confrontés des aléas non liés, hypothèse expérimentale en laquelle un aléa doit fournir la mesure de l'autre et l'éclairer, le faire connaître, votre schéma ne vaut plus.

L'enfant a encore grandi de trois centimètres cette année, puisque l'étagère du grand vaisselier de la cuisine où sont alignées les assiettes en porcelaine de Limoges que nous a léguées tante Adèle lui arrive à présent à hauteur des yeux.

L'élasticité (la croissance de l'enfant) se mesure, se fait connaître, se commente par application d'une grandeur essentiellement non élastique, stable (linéaire, immuable, répétible,nous dirait Tascius) qui, elle, ne se commente point, n'est aucunement topos, ne possède pour toute propriété que son utilitaire linéarité, à peine mentionnable, supposée acquise.

Note: la croissance d'un enfant, et bien entendu toute croissance (économique, démographique, etc.) est exemplaire de toute non-linéarité, avec ses phases en plateau, son asymptotique tassement, sa courbe logarithmique affaissée, etc. La connaissance d'une croissance passe nécessairement par des outils de mesure linéaires qui sont les mieux à même de mettre en évidence la non-linéarité, l'humaine fatigue, les évasements, les écrasements et les résistances de seuil communs aux dynamiques de l'être physique dont la finitude se lit dès le départ de la course.
Francis,

Vous connaissez tous les malheurs de ce forum quand il s'agit de parler de causalité et de corrélation...

Question de traduction, Francis : tournant la phrase en anglais, je verrais whilst et non hence... qu'en pensez-vous ? suis-je dans l'erreur ?
Arrivés à ce point nous touchons encore une problématique (ici, c'est bien le mot!) linguistique fondamentale: que veut dire "veut dire"? Au Japon par exemple, le japonais ne veut rien dire, un énoncé en japonais ne veut strictement rien dire, ce sont nos énoncés qui veulent dire ce que dit le Japonais ou la Japonaise; ce sont les étrangers, tous les étrangers qui, à l'adresse du Japonais, veulent dire et veulent lui faire dire. La volonté de dire (le "vouloir dire") prend appui et trouve son sens dans la seule volonté de rejoindre le dire commun, exprimable et intercommunicable lors même que celui-ci n'est le siège d'aucune volonté d'être traduit ou redit. Le vouloir dire n'est autre que la volonté de rejoindre la commonalité du dire et de l'acquis, lesquels sont, à l'égard de notre écoute espionne de ce dit, sans vouloir aucun. Si j'affirme : "dans le monologue d'Hamlet, "to be or not to be" veut dire etc..." j'inverse artificiellement les termes d'un vouloir faire connaître : c'est moi, et moi seul qui m'engage dans une dynamique volitionnelle à l'égard de Shakespeare quand ce dernier, par la voix de ses acteurs, ne voulut point dire, fut tout dit (il fut tout un dit), et ce sont les tiers, tous autres que lui (siège tout suffisant de cet énoncé) qui, à toute force, veulent dire et oeuvrent à connaître.

La traduction par le vouloir dire consiste en une inversion dynamique d'un dit nu de toute transcendance volitionnelle. Cette traduction met à nu le traducteur et dévoile l'élan solitaire qui le meut. Elle ne fait rien d'autre.

L'inamovibilité du vaisselier donne par convention, par commun accord -- commonalité du dire et de l'entente qu'il suppose --, mesure de la croissance de l'enfant lors même que l'enfant qui grandit sait plus sûrement qu'aucun que sa croissance commande le rétrécissement, puis l'éclatement, du monde qui le contient avant de ne le plus contenir, de s'affaisser comme monde inerte assujetti aux courbes du vivant.

[message modifié]
Pardonnez-moi, Messieurs (oui, car il n'y a que les messieurs qui semblent intéressés par ce débat — les lois d'additivité des propriétés, en plus d'être non-linéaires, seraient-elles également non-dégenrées ?), j'arrive un peu tard dans la discussion. Je voulais malgré tout souligner, au-delà des querelles d'interprétation sur la signification de tel ou tel membre de cette phrase obscure et contrefaite, le peu de cohérence qu'il peut y avoir entre la scientificité d'un discours et sa formalisation syntaxique. J'ai pour ma part un peu de mal à admettre qu'une pensée rationnelle, rigoureuse et méthodique puisse se satisfaire de se voir exprimée dans une langue approximative, antilogique et porteuse d'amphibologies telles que celle qui a fait tiquer M. Marche. Je ne sais évidemment pas qui est l'auteur de ce morceau-là, mais, si c'est la personne qui est à l'origine du raisonnement ou de la démonstration, je ne donne pas cher de sa valeur professionnelle...
Utilisateur anonyme
26 mars 2013, 18:35   Re : Question grammaticale
Le morceau de Marche ressemble à une description de brevet, pour résumer, ce qu'un avocat essaye de faire pour rendre intelligible ce qui n'est accessible qu'à un groupe de spécialistes (pour ces derniers, tout est clair, d'ailleurs ils ne s'expriment pas avec des mots mais avec des enchaînements de formules).

En général le patent lawyer n'arrive qu'à obscurcir davantage ce qu'il prétend transmettre, quelle que soit la langue.
Certes, cher Michon, le spécialiste s'exprime à grands coups de formules... mais en l'occurrence, ce qui est (péniblement) dit ici ne pourrait être exprimé de la sorte. Il y faut l'intermédiaire de la grammaire et de la syntaxe.
Citation
Emmanuel Michon
pour rendre intelligible ce qui n'est accessible qu'à un groupe de spécialistes

La loi prévoit que "le brevet est déclaré nul s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme de métier puisse le réaliser".

Pour moi, tout ceci ressemble plutôt à charabia verbeux.

Pour preuve: "les lois d’additivité des propriétés". S'il y a bien additivité des propriétés, alors, une et une seule loi doit expliquer cette additivité.
26 mars 2013, 20:11   Re : Question grammaticale
» on souhaite mesurer, contrôler, connaître, un dispositif fait de plusieurs variables au comportement (additif ou autres) posé comme non linéraire ("multi-variable non-linéaire" doit s'entendre ainsi)

Pour moi, c'est exactement le contraire : les "lois d'additivité" étant, selon vous, posées comme "linéaires", et ces lois régissant le phénomène en question (les propriétés du mélange obtenu par addition des produits), le comportement dont vous parlez doit être de part en part déterminé, cela me semble évident, par ces même lois : l'on souhaite donc contrôler un processus dont le comportement est posé comme "linéaire", puisque les lois le régissant le sont (linéaires), d'après vous.
"Les lois", en l’occurrence, et le phénomène ou processus décrit par elles, c'est la même chose, puisque ces lois décrivent le comportement du processus ; à mon sens je n'intervertis rien, c'est plutôt vous : d'un côté nous avons donc un processus dont la description serait posée comme "linéaire", et de l'autre certaines techniques et modalités de contrôle dudit processus, lesquelles devraient être multivariables et non linéaires.
La question de fond que je posai demeure : si le processus à étudier et/ou à contrôler est simple, "linéaire", pouvant être décrit par bête addition de ses parties, recomposable et décomposable dans les deux sens à volonté (ce qui est à peu près le sens de la linéarité en question), pourquoi diable se mettre en peine de contrôler la chose de façon complexe, "multivariable", etc., bref, pourquoi surajouter de la complexité à l'étude et au contrôle d'un phénomène qui est d'emblée posé comme simple ??
C'est là, pour le coup, qu’Ockham ne rase plus du tout...
26 mars 2013, 20:25   Re : Question grammaticale
Soit dit en passant, le charabia en question a bel et bien un sens, si l'on convient que les lois d'additivité sont non linéaires : ce sens est qu'une technique de contrôle de certains processus doit être adaptée à l'objet de ce contrôle, au processus à contrôler : on ne peut "monitorer" de façon simple et élémentaire un processus chimique complexe qui nécessite des calculs sophistiqués pour être correctement décrit. En fait cela me paraît très simple...
Utilisateur anonyme
26 mars 2013, 20:34   Re : Question grammaticale
Citation
Bernard Tascius
Citation
Emmanuel Michon
pour rendre intelligible ce qui n'est accessible qu'à un groupe de spécialistes

La loi prévoit que "le brevet est déclaré nul s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme de métier puisse le réaliser".

Allez faire un tour sur google patents, vous allez rire.
Alain,

Il faudrait le texte complet.

Je reste pour ma part du même avis que Francis.

Remplacez "non-linéaire" par "qui n'est pas linéaire" et ce sera plus clair.
Citation
Alain Eytan
pourquoi surajouter de la complexité à l'étude et au contrôle
Justement, l'action de 'contrôle' doit rester simple, mais elle doit rechercher les cas qui n'ont pas été rencontrés, ceux qui sont improbables, ceux que la pensée (linéaire) n'entrevoit pas. Ce n'est pas le contrôle qu'il faut complexifier, mais la méthode, ceci afin de retrouver autant que faire se peut, les conditions du réel. Et le réel, généralement est non-linéaire, inattendu.
Donc, à processus linéaire, méthode de contrôle non linéaire (et vice et versa).
Alain,

Que pensez-vous de ceci :

Cette affirmation de l’objectivité de la presse quant aux problèmes de sécurité représentait un excellent exemple d’application de raisonnements très peu in-nocents puisque les "sujets sensibles » le sont.
26 mars 2013, 22:14   Re : Question grammaticale
Jean-Marc, j'en pense que les "sujets sensibles" sont "très peu in-nocents".

Bernard Tascius, ce que vous dites est à mon sens virtuellement impossible : si certains phénomènes donnés sont décrits de façon satisfaisante par des lois, il sera acquis que le phénomène en question se comportera de la façon que prédiront les lois : c'est le sens du mot "loi" en sciences.
Personne n'ira s’amuser à imaginer ce qui pourrait arriver qui ne soit pas conforme à ce que prédit la loi, parce que dans une réalité où les choses s’affranchiraient tout à coup de nos "lois" en décrivant le comportement, tout, mais absolument tout serait possible, l'eau pourrait bouillir à 5°, la calotte glaciaire se reformer, et je pourrais flotter dans les airs rien qu'en frémissant des narines.
Je n'en démords pas : s'il est établi que votre voiture ne peut excéder les cent kilomètres à l'heure, l'indicateur de vitesse n’affichera qu'un maximum dépassant de peu cette valeur, pas des vitesses supersoniques ou des années-lumière, et il n'est point besoin des transformations de Lorentz pour procéder à la plupart des calculs concernant notre réalité coutumière.
Ils sont surtout nocents, ce qui n'est pas exactement la même chose.

Remplaçons le début par "Cette critique" et "fort peu in-nocents" par "non nocents".

Qu'en pensez vous ?
26 mars 2013, 23:00   Re : Question grammaticale
Euh...

» Ils sont surtout nocents, ce qui n'est pas exactement la même chose.

La litote complètera.
Citation
Alain Eytan
l'eau pourrait bouillir à 5°
Vous me fournissez l'exemple qu'il faut pour étayer mon point de vue.
l'eau peut bouillir (en théorie) à 5°, il suffit pour cela d'avoir la pression adéquate. C'est ce qu'explique la loi d'Avogadro: Pression * Volume / Température = constante

Cette loi d'Avogadro est l'exemple type d'une loi multi-variables, elle fait intervenir la pression, le volume, la température. Et elle dit que pour obtenir une ébullition de l'eau à 5°C, il suffit de se mettre dans un environnement à très basse pression, et de maintenir le volume du récipient constant.
Ainsi, par exemple, l'eau boue à 100°C, soit, mais seulement au bord de la mer. En haut du mont-blanc, c'est déjà un peu moins (85°C) car la pression est moins forte. Et au fond de la mer, c'est 300°C.

Pour en venir à votre propos, comme vous disiez, la loi d'Avogadro est parfaitement connue, aussi, évidemment, personne ne songerait à la contrôler. Ici, les contrôles porteraient non pas sur la loi, mais sur la nécessité que nous avons de maintenir la température, la pression et le volume, aux valeurs que nous souhaitons.
Parmi les diverses techniques de contrôle possibles, une technique classique est appelée PID. PID pour 'produit - intégrale - différentielle'. On vend dans le commerce des puces électroniques qui font cela très bien. Cette technique à trois variables d'entrée (P - I - D) surveille la dérive dans le temps des grandeurs 'Pression, Volume, Température'.
1) Produit - surveille la dérive de P, V ou T, jugée normale (température entre le matin et l'après-midi, entre l'été et l'hiver, ...)
2) Intégrale - surveille la dérive instantanée, pour le cas où l'une des grandeurs P, V ou T, changerait brutalement et instantanément (par exemple une pression explosive)
3) Différentiel - surveille la dérive infinitésimale, pour le cas où l'une des grandeurs P, V ou T, changerait très lentement, insensiblement, par exemple une fuite.
Le PID est une technique de contrôle. Une application possible consisterait, au cours d'une simulation, à jouer sur les variables 'température', 'volume', 'pression', pour observer le comportement du PID, pour voir si la réponse s'accorde au problème, si le temps de réponse est satisfaisant, etc. Ce test devrait donc être aussi erratique (non-linéaire) que possible, de façon à tester la qualité des réponses, voir même leur prédictibilité.
En résumé, le contrôle ne porte pas directement sur les grandeurs physiques, et à plus forte raison sur les lois qui les gouvernent, mais sur les composants industriels qui en font la mesure (ce que nous nommons 'capteur' , capteur de température, capteur de pression). Ainsi de son caractère erratique, inattendu, improbable, non-linéaire, dépend la qualité de ce test, et donc du contrôleur PID testé, tout en ayant à l'esprit que le cadre de cette expérience fut linéaire, connu, répétible.
27 mars 2013, 03:25   Re : Question grammaticale
Mmmm... je comprends ce que vous voulez dire, mais ne suis pas convaincu... Il ne s'agit a priori pas d'une vérification du bon fonctionnement d'instruments de mesure, vérification dont la seule modalité "erratique" vaudra à l'application de ladite méthode de contrôle sa qualification de "non linéaire" — soit dit en passant, la "non-linéarité" commence a être mise à toutes les sauces, et voilà que maintenant elle désigne pour vous le caractère volontairement désordonné et provocateur d'une série de données produites lors d'une simulation visant à s'assurer que les instruments fonctionnent correctement...

Je crois que Francis devra s'armer de persévérance et de courage, et, traquant toutes affaires cessantes le zigomar ovipare pondeur de cette prose, exiger de savoir en quoi consiste la "non-linéarité" des méthodes de contrôle, et si ces foutues lois de l'additivité sont linéaires ou pas.
Impossible de laisser les choses en l'état, nous devons en avoir le cœur net.
Que veut dire "la croissance d'un enfant" ? La croissance de l'enfant dénote et veut dire l'immuabilité de la règle graduée, objet linéaire, qui commence comme il finit, qui "se répète" (Tascius). La règle graduée quant à elle ne veut rien dire, n'a aucun sens -- l'objet linéaire dont la queue et la tête sont identiques est littéralement sans queue ni tête!

En effet, si le sujet de la comparaison (enfant en croissance et échelle graduée) est bien la croissance du jeune, celle-ci n'en vérifie pas moins, par son dynamisme non-linéaire et signifiant, l'immuabilité de la toise graduée, cependant que la toise graduée, qui ne veut rien dire, renseigne sur la croissance. Ce faisant lequel des deux, sujet ou objet, est le plus fortement animé d'un vouloir dire: la croissance vérificatrice de la régularité inerte de la toise ou bien la toise inerte, morte au sens ? Qui parle le plus fort ? La croissance lue, objet de la lecture et sujet de la comparaison ou la toise qui seule ne dit rien ? Et, des deux, celui qui parle le plus fort veut dire quoi sur quoi ?

Quand nous écoutons Glenn Gould jouer une partita de Bach, est-ce, dans le dialogue de ces deux mains, la main droite qui "veut dire" ce que la main gauche souligne et accompagne dans un rôle adjuvant ou bien est-ce l'inverse? où, sur quelle ligne, dans ce système contrapunctique la mélodie du sens se joue-t-elle ?

La croissance est animée d'un vouloir-faire-dire, qu'elle applique à l'agent de renseignement qui est la toise. Ce vouloir-faire-dire n'est que le vouloir-dire minimaliste d'un signifiant certes, mais ce dernier ne s'en montre pas moins davantage animé d'un vouloir que l'indicateur inerte qui en est franchement dépourvu. Dans le relevé de mesure, ce vouloir-faire-dire est porté par un acte principiel de renouvellement de confiance en l'objet sans queue ni tête par le truchement duquel la croissance se fera connaître. La croissance, signifant minimaliste de la règle, lui est ontologiquement asservie. S'agissant de la croissance économique, la règle, en la confiance de laquelle la croissance se proclame, est le chiffre économique, soient les indices/indicateurs et prioritairement leur maître absolu, le PIB. La croissance veut dire le PIB, tout le vouloir-dire économique tient en la proclamation d'une ferveur confiante en ce chiffre sans queue ni tête, linéairement graduée quand rien dans l'activité humaine ne l'est ni ne le sera jamais.

Le "vouloir dire" est un parti pris espion du sens, il l'oriente dès qu'il le pose, le souligne, l'explicite, il se l'approprie, en rend compte à ses supérieurs et se faisant substitue à une dialectique contrapunctique une arbitraire hiérarchie topique organisatrice des phénomènes, en laquelle une voix (un instrument) doit se taire pour déléguer sa parole à une autre. Où l'on retrouve notre "règle démocratique" du sens en situation d'incertitude. Il faut supposer que même en mathématique, comme en physique la masse, le consensus massique, le vouloir dire des masses, imprime sa direction aux démonstrations du sens et ordonne l'identification du sujet et celle des agents indicateurs de son état.
Pour définir le mot 'linéaire':
Un marathon, 50 coureurs numérotés de 1 à 50, et un classement à l'arrivée.
Si deux coureurs ont le même numéro, la course est non-linéaire (pour que la course soit linéaire, il faut que chaque coureur ait un numéro attribué).
Si l'un des coureurs abandonne, la course est non-linéaire (pour que la course soit linéaire, il faut que chaque coureur ait un numéro attribué et une place à l'arrivée).
Si deux coureurs arrivent en même temps sur la ligne d'arrivée, la course est non-linéaire (pour que la course soit linéaire, il faut que chaque coureur ait un numéro attribué et une place attribuée à l'arrivée)
On répète la course indéfiniment. S'il arrive ne serait-ce qu'une seule fois que le marathon soit déclaré non-linéaire, alors il est définitivement à ranger parmi les 'non-linéaires'.
Sinon, il est linéaire, et peu importe l'ordre d'arrivée des coureurs.

(Autrement dit, tout le monde est identifié, on ne perd personne en cours de route, et chacun fait ce qu'il peut).
Francis, il me semble que les deux exemples que vous avez choisis illustrent a contrario ce que voudrait dire la phrase d'après vous : d'un côté nous avons la règle graduée et les indicateurs de croissance économique, linéaires, et de l'autre le processus de croissance de l'enfant (l'enfant en croissance, dites-vous) et l'activité économique elle-même, phénomènes qualifiés par vous de dynamiques et non linéaires.
La phrase postule le contraire : des méthodes de mesures ou de contrôle non linéaires, et, selon vous, un processus linéaire, puisque déterminé dans son comportement par des lois linéaires.


Ecoutez, concernant la linéarité ou non de ces "lois d'addivité", je suis de plus en plus persuadé qu'elles relèvent, dans le domaine considéré, de la non-linéarité, pour la raison que j'ai déjà dite, et que je vais essayer de résumer le plus simplement possible.

Il s'agit d'une question relevant du mélange de produits chimiques : la "linéarité" d'un tel mélange, quant à ses propriétés, impliquerait que si l'on mélangeait les produits a,b,c ayant chacun un ensemble x,y,z de propriétés, l'on obtiendrait un mélange ayant x,y,z propriétés, et ainsi de suite ; la "linéarité" en question impliquant l'addition simple des actions et des propriétés.
L'on retrouvera toujours dans le mélange obtenu ce qu'on y aura ajouté, l'addition ne produisant aucune nouveauté, nouveauté indiquant la limite du système et le moment de rupture de linéarité.
En ce sens, perte de la proportionnalité, accroissement de la complexité et apparition de la nouveauté signifient à peu près la même chose : que le système ne peut plus être modélisé de façon linéaire.

Que voudrait dire la "non linéarité" dans le problème qui nous occupe, à savoir le mélange de produits chimiques différents ? tout simplement que ce mélange induira une propriété nouvelle, non réductible de façon triviale, par simple addition, aux propriétés de chaque produit constituant le mélange.

Bref, si le "mélange des bases" produira un phénomène "nouveau", réalisant un saut qualitatif par rapport aux bases en question, alors les "lois d'additivité" réglementant ce qu'on obtient en procédant au mélange doivent être "non linéaires".

(Cela dit je vais relire ce que vous avez écrit, parce que pour un ruminant comme moi, à la digestion intellectuelle un peu lente par moments, il faut du temps...)
à Bernard Tascius:

Les événements d'athlétisme, de tous temps en Occident, et à commencer par les Jeux grecs, sont, autant que de la prouesse et de l'esthétique des corps en mouvement la célébration de la règle graduée, l'expression d'un culte exalté à la norme métrique, reine des corps en exercice, pliés à sa loi.

La course de Marathon, la course contre la montre, ont l'unité de mesure (distance, temps) pour idole. Les jeux peuvent être autres que cela, en Orient en particulier mais aussi en Europe médiévale: combats réglés par le choix des formes, chorégraphie de masse, jeux de couleurs, puissance symbolique des blasons, libre exubérance de l’apparat, tournois où la chance entre pour une part, etc.).

Ma règle, rigide et sans queue ni tête, est tout à l'inverse des corps, qui ne se terminent pas comme ils commencent, qui sont munis d'une tête, d'un sens directionnel, et qui savent ployer et se contorsionner. C'est dans ce contrepoint entre linéarité et non-linéarité qu'a lieu l'événement du sens.
28 mars 2013, 04:08   Re : Question grammaticale
Soit dit en passant, la règle graduée, ou tout autre indicateur de grandeur, instrument de mesure etc., sont totalement sensés, en ceci qu'ils ne sont que signe, donc que sens : n'ayant d'autre utilité et usage que de renseigner sur autre chose qu'eux-mêmes, n'ayant à vrai dire pas d'"existence" propre, ils illustrent par leur fonction le pur sens, qui n'est que mouvement projectif vers une altérité qui doue d'une raison d'être.
La vie la plus pleine, la plus autonome, la plus comblée, donc la plus suffisante, la plus auto-suffisante, n'a besoin de rien d'autre, ne fait signe vers rien d'autre : elle est précisément insensée.
Si je vous ai parlé de ce qui, n'ayant pas de sens, est sans queue ni tête et ne veut rien dire, ce n'est pas pour introduire Raymond Devos dans un exercice de déconstructionnisme néo-derridien ou pour me faire les doigts sur la harpe des amphibologies wittgensteiniennes, encore que ce type de résonance n'ait rien pour me déplaire.

La règle, et je veux parler ici de l'objet, la réglette de bois graduée, est une chose qui commence comme elle finit (à la différence de toute existence humaine dicible, narrable), c'est à dire comme un de nos intervenants l'a ma foi assez bien résumé, qu'elle se répète métronomiquement, et c'est cela qui en fait un objet linéaire. Si la règle (et ceci vaut aussi pour la règle de vie éminemment transgressable), était un coquet objet non-linéaire, les centimètres, au fur et à mesure qu'ils s'éloigneraient du point zéro, présenteraient des intervalles de plus en plus gros, voilà qui serait la transcription physique d'une équation non linéaire. Une règle non linéaire se verrait ainsi pourvue d'une tête (le point zéro) et d'une queue très empanachée aux graduations s'espaçant vers l'infini. La structure de la règle non linéaire serait ainsi celle d'une comète. L'univers, le ballet des corps célestes, aiment faire se rencontrer de la sorte les objets linéaires (orbites circulaires, système sans précessions, etc.) et les objets non-linéaires dont le comportement est subsumable à des normes linéaires (double foyer des orbites ellipsoïdales), autrement dit l'esprit humain, jusqu'à présent et jusqu'à mieux informé, se sert de la linéarité pour connaître et explorer la non-linéarité, et non l'inverse. Mais dans cette exploration, qui interroge qui ? Qui est doté du pouvoir physique de poser les questions ? d'interroger l'objet ?

Ce qui n'a aucun sens topographique (aucune orientation tête-queue) ne peut rien vouloir dire. La volonté de dire, de rapporter le sens, suppose que ce dernier soit interprétable par une tête. Ce qui "veut dire", ce qui est doté d'un vouloir-dire, est la chose orientée, non linéaire, qui anime et fait parler la règle, laquelle est mutique et inconformable (l'existence humaine ne peut ni de doit s'y conformer d'une part, et d'autre part elle est si dépourvue de sens que l'on ne peut, et à plus forte raison l'existence humaine qui s'y conformerait, la mettre sens dessus dessous, la retourner).

Pour en revenir au propos initial: la règle est insensée et ne peut vouloir rien dire. La non-linéarité veut dire la règle. Et il n'est point, entre ces deux là, d'autre sujet du vouloir-dire que la non-linéarité et d'autre objet du vouloir-dire que la linéarité sans tête pour dire ni pied pour se poser.

[message modifié]
Et en effet, une vie réglée est ainsi très précisément et très parfaitement insensée.
Citation
Francis Marche
Ma règle, rigide et sans queue ni tête, est tout à l'inverse des corps, qui ne se terminent pas comme ils commencent, qui sont munis d'une tête, d'un sens directionnel, et qui savent ployer et se contorsionner. C'est dans ce contrepoint entre linéarité et non-linéarité qu'a lieu l'événement du sens.

Oublier la métrique et ne s'intéresser qu'aux pliures.
La topologie rejoint cette volonté de contorsionne-ment du réel : le royaume de la pâte à modeler (autant dire, le paradis des enfants).


"le paradis des enfants", qu'est-ce à dire Tascius ? Précisez votre pensée, avant que je me sente tenté de l'envoyer à la poubelle des remarques obliques et sardoniques, pêle-mêle avec le sourire en coin de la Joconde, les potacheries d'adolescents suffisants et les plaisanteries télévisuelles du samedi soir.
Je veux seulement dire que, les formes, les pliures, les déformations, les enfants les manipules naturellement.
Les adultes, eux, préfèrent les structures, les carrés, le linéaire, la métrique.
La topologie réhabilite une science qui n'avait plus sa place que dans les maternelles, autour de la pâte à modeler, et chez les primitifs.
Nous lui devons quasiment toutes nos médailles Fields, et le pape de la Topologie, c'est René Thom.

(J'ai bien quelques-uns de ces enfantillages dans un recoin de ma tête, mais par pitié, ne m'obligez pas à les ressortir. )
Ah ! parfait Tascius, non seulement vous me rassurez mais vous m'enchantez. Je suis grand amateur, et admirateur des travaux de René Thom et de l'ensemble de ses recherches sur les "catastrophes topologiques". Ses publications sur ce sujet, une vaste compilation d'articles, ont été réunies en CD-Rom il y a maintenant une quinzaine d'années par le CNRS. Hélas l'outil, pionnier encore à cette époque dans l'université française, a été très décevant, à la limite de l'utilisable. Il ne me semble pas, mais je suis très mal renseigné de l'actualité dans ce domaine, que cette voie de recherche originale ait fait école, ait livré tout son potentiel. Je serais ravi de vous lire sur la question.
Êtes-vous mathématicien, Bernard ?
Mathématicien, c'est beaucoup dire. J'ai fait une école en Sciences Appliquées, alors, les maths, comme dirait Hollande, c'est ma boite à outils.
Je fus dans le passé un lecteur assidu de Bourbaki, c'est une excellente école de précision.
29 mars 2013, 22:52   Re : Question grammaticale
» Si la règle (et ceci vaut aussi pour la règle de vie éminemment transgressable), était un coquet objet non-linéaire, les centimètres, au fur et à mesure qu'ils s'éloigneraient du point zéro, présenteraient des intervalles de plus en plus gros, voilà qui serait la transcription physique d'une équation non linéaire

Il me semble que tant que les intervalles croissent de façon régulière, la fonction restera linéaire ?


» Ce qui n'a aucun sens topographique (aucune orientation tête-queue) ne peut rien vouloir dire. La volonté de dire, de rapporter le sens, suppose que ce dernier soit interprétable par une tête. Ce qui "veut dire", ce qui est doté d'un vouloir-dire, est la chose orientée

Je ne sache pas qu'un mot, ou une action, aient à proprement parler une tête, ou d'ailleurs une queue, et pourtant, par extraordinaire, ils peuvent bel et bien avoir un sens ; peut-être allez-vous me dire que pour qu'ils en aient un, de sens, il faut qu'il y ait une tête qui fait usage du mot, ou exécute l'action en vue de quelque but, mais dans ce cas, en quoi est-ce différent de l'usage de la règle ?

Wittgenstein, justement (dont les propos, au reste, tendaient toujours à être le moins amphibologiques possible), prétendait que le sens fût l'usage, tînt tout entier dans l'usage qu'on faisait de la chose, la dotant ainsi de sens ; j'ai l'impression que vous confondez, en l'occurrence, l'usage, et l'agent qui fait usage : le sens n'étant pas l'agent, comme l'acte n'est pas celui qui l'accomplit, comme le mot n'est pas la langue, les cordes vocales, l'appareil pensant, la tête ou le corps tout entier de celui qui l'emploie, la règle n'a pas non plus besoin d'avoir les attributs physiques de celui qui en fait usage pour avoir un usage, donc un sens.
Derechef, n’étant que signification, précisément, et n'ayant d'être que par l'usage à quoi elle est destinée, elle n'est que sens. À mon avis.

Comme je ne suis pas d'accord avec vous quant au sens qu'il faut donner à la "linéarité/non-linéarité", ni d'ailleurs quant au sens qu'il faut donner au sens, je ne partage pas non plus votre conception sur la symétrie que vous tentez d'établir entre la linéarité et le non-sens, et la non-linéarité et le sens.

La seule chose que je reconnais, c'est qu'il peut y avoir un certain air de famille entre le tête-à-queue et une "rupture de linéarité"...
Citation
Jean-Marc du Masnau
Je fus dans le passé un lecteur assidu de Bourbaki

Prenez garde, tous ceux qui lisent Bourbaki dans le texte, sont kidnappés par les chinois.
Je ne suis pas menacé par le kidnapping, hélas... dans mon cas, ce serait plutôt le séniloraptage...
Cela, Eytan et Tascius et Marche réunis, devrait nous amener à penser un peu au langage, pas à la langue seulement.

Le "bourbaki" en tant que langage est un peu comme certain espace mathématiques, parfait et complet. On ne peut retrancher un mot sans faire s'effondrer la phrase, il n'y a bien souvent qu'une façon de dire les choses, l'opinion est bannie et le fait triomphe.

La présentation du texte, elle-même, est sobre. Foin de mises en page savantes. La ponctuation est limitée au strict nécessaire, la répétition est fréquente car le vrai sinonyme est fort rare, et en user serait déformer l'idée.

Etudiâtes-vous, les uns ou les autres, le bourbaki ?
(En chine, on bosse jusqu'à 99.999 ans. Si vous lisez Bourbaki, c'est pas l'âge qui vous sauvera des chinois).

Un jour, comme on me faisait remarquer pour la 5000e fois, qu'au Moyen-Age, la terre était plate, j'ai eu l'idée saugrenue de répondre que c'était toujours le cas ! J'avais plutôt à l'esprit ces méthodes des projections cartographiques qui transforment un globe terrestre en une carte. Et en topologie, c'est beaucoup plus simple à faire qu'en géométrie.
Par exemple,
au Moyen-Age, on considère 4 dimensions, 3 pour l'espace (longueur, largeur, hauteur) et une pour le temps. Mais le temps, c'est l'affaire du Roi, donc, celle de Dieu. La dimension 'temps' se réduit alors à un seul point, le Roi, qui l'incarne, le produit, le personnifie.
La terre est plate parce qu'un seul individu personnifie la dimension 'temps', à savoir le Roi. Le temps se projette dans la vie du Roi. Donc la Terre est plate: ce que nous voyons c'est sa projection dans un espace a-temporel..
La mode n'existe pas, ce qui existe ce sont les styles Louis XIII, XIV,..., qui composent la métrique du temps. A l'opposé le quattrocento ne fait que chercher à casser ce code, mais il faut garder à l'esprit qu'au début, Giotto, Cimabue, peignent le sacré, c'est-à-dire l'intemporel, et s'interdisent de peindre tout ce qui renvoie au temps qui passe, aux nuages, à la lumière du jour, qui sont des interdits.

Aujourd'hui, la situation se retrouve si l'on considère non plus 4 mais 5 dimensions, la longueur, la largeur, la hauteur , le temps, et l'Internet.
Nous pouvons dire que la Terre est plate, mais dans un espace à 5 dimensions. Car, de la même façon, une de ces dimensions, l'Internet, se réduit à un seul point : Google (en fait, l'organisation fonctionnelle qu'incarne à merveille Google) Google personnifie l'Internet. Tous les changements qui s'opèrent dépendent de la façon dont le moteur de recherche évolue. C'est un peu schématique, mais si l'on observe l'architecture interne de l'Internet (ce que l'on retrouve dans le modèle OSI), chacune des couches fonctionnelles reproduit ce résultat. Et ça commence à se voir dans l'économie réelle-réelle, puisque les supermarchés souffrent de l'installation d'Amazon, ce pur produit du net qui n'existerait pas si Google n'existait pas.

Comme quoi, la topologie, c'est une peu comme la prose de M. Jourdain, ça nous vient naturellement (et ça n'interdit pas de dire des conneries).
30 mars 2013, 21:13   Re : Question grammaticale
Jean-Marc, pour ma part, je ne connais des bourbakistes que des généralités insignifiantes.

Bernard Tascius, vous intriguez, avec votre histoire de la platitude de la terre par confiscation souveraine du temps : mais c'est un fait que sa rotondité, et les courbes en général, ne lui seront rendues que bien plus tard.
Vous passez sous silence, dans l'histoire des dimensions, le rôle joué dans l'avènement de l'art moderne par la "quatrième dimension", ou "hyperespace", qui n'était pourtant pas une dimension temporelle...
Je pensais à la rigueur des démonstrations.
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