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Le Grand Remplacement, une modalité normale de la vie ?

Envoyé par Loïk Anton 
Supposons une personne née en 1870. De son vivant, elle va voir se développer les trains, naître puis se répandre les voitures, les avions, la radio, et si elle vit assez longtemps la télévision et l'arme atomique.
Pour cette personne, la plupart des objets de son monde auront été remplacés ; les nés bien après elle auront aussi une mentalité qui lui est étrangère, une mentalité adaptée aux téléphones et aux avions.
Elle se sentira donc victime d'un Grand Remplacement - même sans aucun phénomène migratoire de masse.

D'autre part, les habitants nés en France disons en 2020 verront peut-être émerger, de leur vivant, les voyages sur Mars, le port obligatoire d'une sorte de coque de protection, une taxe sur l'air que l'on respire etc. Ces personnes nées en 2020 se sentiront alors étrangères et "remplacées" par les nouveaux habitants, habitués à ces nouvelles technologies et pénétrés d'une mentalité relativement différente de la leur.

Si on admet ce raisonnement on en arrive à supposer que le Grand Remplacement n'est qu'un phénomène naturel, qui consiste à se sentir étranger au nouvel environnement qui nous succède. Hormis dans les sociétés traditionnelles, tout le monde subirait un Grand Remplacement qu'il ressent comme tel. Le nouvel environnement peut être dû aux "progrès techniques", aux migrations, aux changements économiques voire écologiques ou climatiques, mais il est inévitable et tiendrait alors de la normalité.

Dans un monde soumis à la roue du "progrès", ce serait bien le "non Grand Remplacement" qui serait une modalité anti-naturelle...

(Message légèrement modifié en tenant compte des observations de R. Camus).
Toute l'histoire des peuples n'est-elle pas une tentative pour contrecarrer ces forces "remplacistes" et pour survivre aux évolutions fatales, pour durer (notamment sous la forme des traditions) ?
Ah non, pitié ! Je sais bien que les participes passés appuyés sur des pronoms démonstratifs (”ceux nés en 1870”) bénéficient sur ce forum de hautes protections, à ma complète désapprobation, mais j’espère qu’il ne va pas falloir s’accommoder en plus de participes passés appuyés sur des adjectifs démonstratifs (“ces nés en 1870”)...
C'est que, Monsieur Anton, vous n'avez pas choisi votre date au hasard ! Imaginons maintenant un Rémois né en 1200 et mort en 1275 : en fait de “grand remplacement”, il n'aura pas eu grand-chose à se mettre sous l'œil ni l'esprit. Tout juste s'il aura pu assister à trois sacres pour se distraire un peu et se débarrasser de quelques écrouelles au passage. Même l'érection de la cathédrale, on peut parier qu'elle ne l'aura pas bouleversé plus que cela, dans la mesure où elle aura duré autant que sa propre vie.
Cher Didier, je pense que l'idée de Loïk est à considérer, et la votre aussi.

Il y a eu des périodes fort calmes, c'est assez probable. Il y a eu des périodes de forte accélération.

Un Anglais né en 1690 aura vu la révolution agricole, changement majeur.

Un Français né en 1760 aura vu l'effondrement de la société de classes, la fin des Parlements, l'arrivée du Code civil, le passage au premier rang de la bourgeoisie propriétaire.

Un homme né en 1800 aura vu la mécanisation devenir possible grâce à la machine à vapeur et l'espace brusquement se réduire avec l'apparition des trains.
Oui, c'est l'accélération du phénomène, son emballement infernal, qui est stupéfiante. Un vieux quartier change de visage ethnique en quelques années, il devient méconnaissable sans que personne n'ait le temps de réagir. L'habitant "historique", qui a fait le choix de rester, finit au beau milieu d'un vague territoire qui, hier encore, était son chez lui. Il vivait quelque part, il se retrouve nulle part. Malheur aux vaincus, braves gens et autres Français moyens, de l'Histoire devenue folle...
Cher Monsieur Comolli,

Je pense que ces changements ont lieu, en quelque sorte, par bonds.

Ces bonds sont plus ou moins importants, c'est vrai.

Ceci dit, je ne suis pas persuadé que le changement observé actuellement (pour faire court, le changement entre 1953 et 2013) soit beaucoup plus grand que celui vu par un enfant de la campagne bretonne né en 1885 dans un milieu bretonnant et qui était promis au travail agricole, lequel enfant survit à la guerre et termine sa vie active comme ouvrier à Paris.
On pourrait arguer que certains changements procèdent d'une sorte de logique interne à la civilisation, d'autres au contraire étant comme imprimés de l'extérieur, et changeant le cours global de ladite civilisation...
Néanmoins le passage de l'ordre royal au républicain, ou du travail du bras à celui de la machine, semblent constituer à eux seuls des Grands Remplacements.
Un historien original et patient établirait la généalogie du phénomène, en scrutant et évaluant les formes que prennent les différentes périodes de "changement", ce qui active et détermine les passages de l'une à l'autre, ce qui, en matière d'identité, se gagne et se perd à chaque fois. Peut-être parviendrait-il ainsi à dégager les quelques drames pendant lesquels les Français ont cessé d'être français. Le but étant d'expliquer des constats du type, "Nous nous sommes faits américains"(Debord).
Il ne faudrait quand même pas mettre le GR à toutes les sauces : il s'agit d'un d'un changement et remplacement de peuple, avant tout, induisant un environnement humain et culturel différents ; les modifications de l'environnement matériel et technique, c'est autre chose.
Peut-être même n'est-il pas totalement indifférent que les changements environnementaux liés aux avancées technologiques semblent accélérés dans les sociétés aux populations menacées de remplacement justement, alors que les remplaçants jouissent chez eux, de ce point de vue, d'une stabilité qui serait enviable si elle ne confinait à la stagnation, jusqu'à présent du moins.

D'ailleurs, je ne vois pas en quoi la normalité ou le caractère "naturel" d'un phénomène serait une caution en quoi que ce soit. Il est des choses naturelles absolument détestables, auxquelles l'ingéniosité humaine a fort heureusement pu faire pièce par les procédés les plus artéfactuels ; au diable la normalité ou la nature, si certaines de ses manifestations ne nous conviennent pas, enfin...
Entièrement d'accord avec Alain Eytan.
Excusez moi mais même si contraint et forcé par la conjoncture et votre entourage vous changez votre charrue pour un tracteur, vos lampes à pétrole pour des lampes électriques, votre lessiveuse à vapeur pour une machine à laver automatique, votre poste de radio pour une télévision, et tous vos anciens meubles en bois pour un mobilier d'aéroport ; même si vous vous déplacez en automobile ou en train plutôt qu'en vélo, vous vous sentirez toujours plus ou moins chez vous. En revanche que s'installe dans votre maison, de force, une famille inconnue qui se comporte en étrangère, hostile de surcroît, et c'est vous qui vous sentirez illico étranger dans votre propre foyer eussiez-vous gardé l'éclairage à la bougie, le cheval de trait et le papier à fleurs de votre enfance.
J'ai écrit le message de départ en étant tombé sur "Ménilmontant" de Trénet. Celui-ci raconte qu'il revient dans le quartier de son enfance. Je ne suis pas sûr que dès l'après-guerre, une personne d'avant-guerre se soit sentie tant que cela chez elle. La plupart des gens voient les objets, les magasins et les personnes changer ; que ce changement soit dû à des migrations ou au bougisme ambiant, il me semble assez intensif...
Citation
Jean-Marc du Masnau
Ceci dit, je ne suis pas persuadé que le changement observé actuellement (pour faire court, le changement entre 1953 et 2013) soit beaucoup plus grand que celui vu par un enfant de la campagne bretonne né en 1885 dans un milieu bretonnant et qui était promis au travail agricole, lequel enfant survit à la guerre et termine sa vie active comme ouvrier à Paris.

Pierre-Jakez Hélias, qui décrit, dans Le cheval d'orgueil, un parcours assez proche de celui que vous évoquez, disait à ce sujet "il est plus facile d'être de son temps que d'être de quelque part."

Il me semble également qu'il faut tenir compte, dans cette histoire de la perception des modifications d'un environnement naturel, social et technique, de l'augmentation de la population, qui est un facteur capital.
Oui, c'est exactement mon point de vue.

La période 1880 / 1960 fut celle sinon du "Grand Remplacement", du moins celle du "Grand Déracinement".

L'Aveyron passe de 415 000 habitants en 1886 à 287 000 en 1960, la Seine-et-Oise de 580 000 à 2 300 000...

Je ne parle même pas de migrations intra-départementales, statistiquement encore plus importantes.

En 1810, on nait, se marie et meurt dans son canton, en général. En 1950, plus du tout.
"Dans cette pâtisserie terrifiante, la réflexion qui vient tôt ou tard à l’esprit est une interrogation sur la multitude. Qui fut le géant du XIXème siècle ? Marx ou Malthus ? Nous avons si longtemps cru que c’était Marx, que nous fermions les yeux sur la poussée démographique. Vienne un monde meilleur et l’écorce terrestre se garnirait gaiement de petits communistes. Nous étions assurés du bonheur innombrable, dont le dernier obstacle s’appelait le capitalisme.

Je tiens à rappeler les gorges chaudes que l’on faisait du grand Malthus. Cette pensée lucide avait le tort de mettre en cause le contentement de l’espèce humaine à gonfler comme un sac d’écus. Elle investissait le tabou le plus enfoncé dans la conscience collective, celui de la reproduction. Elle cinglait d’une blessure inavouable la tautologie suprême de l’homme en train de germer sur le terreau de l’homme. Elle était pire qu’un blasphème, pire qu’une injure au tabernacle : elle insultait la majesté de la queue fécondante.

Si Marx a eu raison à l’échelle dérisoire d’une centaine d’années, Malthus n’a pas fini de faire parler de lui. Il avait pressenti que la terre baignerait dans une sauce de poux, deux ou trois siècles après sa mort. Ils sont là, les insectes, et c’est le grouillement de ces hommes semblables qui lui donne la taille d’un géant. Dans l’Angleterre qui sortait des famines, il a eu l’alibi de s’occuper des subsistances et de la courbe des besoins. Mais ce moraliste, déguisé pour la circonstance en économiste, voyait juste quand il fustigeait le surpeuplement.

On procrée. On promiscuite. On se sent fort d’être beaucoup. Cela tient d’une conjuration de l’angoisse et d’une exhibition des bons sentiments. Il y a, dans le tumulte des naissances qui envahit l’état civil, l’apaisement du devoir accompli. Le père jubile, comme un chien fidèle, d’être un maillon dans la chaîne des pères. Rien ne résiste à la tornade du bipède multipliant. On manque toujours de quelque chose : d’écoles ou de maisons. On lotit les grands parcs solitaires et glacés. Cette année, 500 000 touristes déferleront sur Aigues-Mortes, la songeuse Aigues-Mortes, bijou pervers de Bérénice. L’an prochain, 900 000, et dans trois ans, 18 millions. « Toujours plus de… » , c’est le mot d’ordre. Mais plus de quoi ? Plus de volupté ? Plus d’abîmes franchis et de couleurs neuves ?

Non. Toujours plus d’enfants, plus de tonnes d’acier, plus de mètres carrés de surface habitable. C’est le cycle infernal de la natalité et du travail humain. On croit tenir le terme et s’arrêter enfin au pied du Sinaï. Rien à faire. Les champignons vagissent dans le cœur des berceaux. Il n’y aura plus de soir bleuté sur les roches paisibles. On accouche à toute heure. Inexorablement, la terre se couvre de giclées – giclées de vie, grouillements de cités, araignées de buildings et de manufactures – comme un tableau de Pollock.

Cette course au labeur est une histoire de fous. On fabrique des gosses. Après quoi on déclare : ils ont des droits sur nous. Et ces gosses à leur tour n’ont rien de plus pressé, quand ils atteignent l’âge de la reproduction, que de fonder ce qu’on nomme sans rire une famille nombreuse. C’est une ruée obstétricale qui est indépendante des régimes sociaux. Capitalisme ou communisme, vieux pays ou tiers-monde, rien n’y échappe. Les catégories de Marx sont dépassées. On entre dans le règne du nombre où la théorie de Malthus, après cent ans d’occultation, prend justement le sens d’un cri d’alarme.

La civilisation de masse où se dilue, jour après jour, tout ce que nous aimons, est le produit de cette croissance folle. L’harassante expansion de l’économie et le conditionnement des individus à une sous-culture, qui les rend similaires dans les plus bas niveaux de l’activité mentale, sont les deux faces d’un même phénomène, la natalité. Il est temps de dire : ça suffit, nous avons épuisé les joies du troupeau. »

Raymond Borde – L’extricable (1964)
Allez, pour faire bonne mesure, un petit coup de Gombrowicz :

« Comment se fait-il qu'ils ne soient pas capables de se rendre compte du fait essentiel — à savoir que, tandis qu'ils discutent, le nombre de gens ne cesse d'augmenter ? Quel démon animé d'une malveillance absolument gratuite les empêche de se rendre compte du nombre ? Dites, à quoi bon les systèmes les plus justes et la répartition des biens la plus équitable si entre-temps la voisine se multiplie par douze, si le crétin du rez-de-chaussée fait six gosses à sa gonzesse et si, au premier étage, on passe de deux à huit locataires ? Sans parler des Noirs, des Asiatiques, des Malais, des Arabes, des Turcs et des Chinois. Des Hindous. Que sont tous vos discours sinon les sornettes d'un idiot qui ignore la dynamique de ses propres organes génitaux ? Que sont-ils sinon le caquetage d'une poule assise sur la plus terrible des bombes — ses œufs ? »

(Journal, 1962)

« Démocrite… Combien ? Mettons : Démocrite, 400 000.
Saint François d’Assise, 50 000 000
Kosciuszko, 500 000 000
Brahms, 1 000 000 000
Gombrowicz, 2 500 000 000.
Les chiffres placés après chaque nom représentent l’ "horizon humain" du personnage envisagé, c’est-à-dire à combien à peu près il évaluait la population de son temps – comment il se voyait lui-même en tant qu’ "un parmi beaucoup d’autres". Combien d’autres ? Je mets des chiffres au hasard… mais j’estime qu’il serait judicieux d’associer des chiffres à chaque nom de façon qu’on puisse connaître non seulement le nom d’un homme mais aussi sa "place parmi les autres". C’est ce qu’on pourrait appeler le "nombre" d’un individu, sa "quantité". […]
Si je suis un parmi deux milliards, ce n’est pas la même chose que si j’étais un parmi deux cent mille. »

(Ibid.)
Les Africains ont remplacé en quelque sorte leur pays d'origine par la France. Ils y ont trouvé un environnement radicalement différent de celui de leur pays d'origine. Pour autant ils ne souffrent pas de ce changement parce qu'ils y ont spontanémnent, naturellement, trouvé la parade radicale : se regrouper entre eux. Il n'y a de vraie richesse que d'hommes disait Gide. Il pourrait ajouter aujourd'hui qu'il ne peut y avoir de vraie sérénité pour un peuple qu'entre semblables, l"Autre n'étant toléré qu'à la marge (le fameux seuil de tolérance variable selon les civilisations et dont la nôtre par sa capacité d'ouverture ouverture a le moins à rougir ) ni de pire misère que celle de se faire déposséder de son pays par des populations étrangères au point de ne plus s'y sentir nulle part entre soi.
24 avril 2013, 23:07   La vraie vie
« De quelque façon que j'abordai ces trois Nègres — soit d'emblée et m'avançant vers eux en un élan cordial, soit avec la retenue polie de quelqu'un qui se renseigne et, comme l'air est bon sous les étoiles et qu'on est désœuvré quand a sonné minuit, lie ensuite conversation, soit escorté de ceux qui étaient mes guides et, maintenant, me remettaient en d'autres mains — je leur dis que j'aurais grand plaisir à me promener avec eux. À cela ils n'opposèrent pas la moindre objection, et nous partîmes tous les quatre, eux m'encadrant comme de hauts et robustes gardes du corps.
Combien au juste dura cette promenade ? Où allâmes-nous ? Et de quoi parlâmes-nous ? Il est probable que nos propos se limitèrent à un monologue décousu, au cours duquel j'affirmai mon désir d'une compréhension meilleure entre les races, mon amour pour l'Afrique et la très grande estime en laquelle je tenais les Africains, gens plus proches de la vraie vie que les Européens. Il est probable aussi que mes trois acolytes, peu ouverts au platonisme de mes discours, me proposèrent des femmes et j'ai souvenir de vagues conciliabules chuchotés d'eux trois à de grandes cariatides noires, au repos sous des vérandas et fondues presque avec la nuit, pourparlers vraisemblablement commerciaux dont rien ne résulta. Bientôt, je crois que je ne dis plus rien : je me bornai à savourer la joie de nous promener ainsi bras dessus bras dessous dans la douceur des ténèbres. Disposant de ces appuis vigoureux et faisant aller mes jambes sans y penser, peut-être étais-je à la limite de l’assoupissement quand un violent coup de poing au menton me rappela à moi et, dissipant plus qu’à moitié mon ivresse, me fit comprendre en un éclair que mes trois acolytes m’assommaient pour me dévaliser.
Jeté à terre par l’uppercut ou le crochet à la mâchoire je sentis mes chevilles tordues, mes agresseurs m’arrachant mes souliers sans prendre — évidemment ! — la peine de les délacer. Encore tout ahuri, j’entendis mes trois gaillards se sauver à toutes jambes et me trouvai à demi étendu sur les marches d’un escalier, tandis que venait vers moi un Européen trapu en short blanc et chemise-veste à manches coupées. C’était un gradé de la marine (me le dit-il ou vis-je ses ancres d’or ?) qui, attiré par le bruit avait mis mes voleurs en fuite et, maintenant, m’aidait à me relever. À quelque distance je retrouvai l’un de mes souliers, abandonné dans le sauve-qui-peut ; mais je constatai que mon portefeuille avait disparu de ma poche-revolver droite, largement déchirée.
Je chaussai mon unique soulier, m'époussetai, respirai l’odeur de la verdure entourant le vaste bâtiment à la garde duquel l’homme de la mer paraissait préposé et répondis à ses questions : non je n’avais pas mal, aucune contusion, seulement les chevilles un peu endolories. Mais que diable pouvais-je faire avec ces Nègres ? « Je me promenais. — Comment ! tu te promenais avec des Nègres ! Tu venais de te faire enculer ! » Aussitôt je le traitai d’ordure, nous nous battîmes et cela ne traîna pas : comme il était (ai-je dit) trapu, il ne mit que quelques secondes à m’envoyer — pour un second knock-out — sur les marches de mon escalier.

[...]
Aux voleurs qui m’avaient si proprement étendu, sans être nécessairement des spécialistes de la fameuse lutte sénégalaise pour laquelle se passionne la foule des dimanches dakarois, je n’en voulais en aucune manière […] Ce que je regardai comme proprement inqualifiable, c’était la conduite de ce sous-officier si convaincu de l’absence de commune mesure entre race noire et race blanche qu’il ne concevait pas qu’on puisse noctambuler avec des Nègres sans le faire pour des motifs sexuellement intéressés, et cela un jour où se célébrait l’écrasement de l’hitlérisme !
À ce flic je ne pouvais riposter que par les flics : j’irai au commissariat et porterai plainte contre le Blanc indigne qui m’avait ignominieusement injurié et frappé… »

Michel Leiris, Fourbis
26 avril 2013, 11:55   Re : La vraie vie
Moi, je ne vois pas ce qu'il avait à reprocher à ce fonctionnaire blanc. Si celui -ci avait dit comme on pouvait s'y attendre en la circonstance que les noirs ont le vol dans le sang, Leiris eût été fondé à s'indigner, mais ledit fonctionnaire n'avance rien de tel. Il se contente de reprocher, non aux noirs mais à lui, Leiris, d'avoir cherché à se faire sodomiser par eux. C'est donc de ce dernier qu'il avait une mauvaise opinion et non des autres. De plus, que veut dire : " les Africains sont plus proches de la vraie vie que les Européens " ? Ne pas faire d'histoires pour sodomiser un blanc que ne demanderait peut-être qu'à l'être, n'est-ce pas à ce genre de détail, d'absence de tabou sexuel (entre autres) que l'on reconnaît que les Africainss sont " plus proches de la vraie vie que les Européens " ? Auquel cas Leiris ne devrait pas juge infâmant pour eux un tel soupçon.
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