Il ne s'agit pas d'écrire contre l'islam, mais d'essayer de comprendre son fulgurant succès. Mon analogie consiste simplement qu'il a le même succès que les fast-foods, dans doute pour les mêmes raisons : simplicité, uniformité et apparente égalité à l'intérieur de l'oumma ou du fast-food.
Il ne suffit pas de dire que l'islam "n'appartient pas à notre civilisation, il est incompatible avec nos mœurs, nos lois et nos usages", pour que la question soit réglée. Il faut encore savoir ce qu'il est et pourquoi, partout, il connut une telle réussite.
Un aumônier militaire ayant beaucoup séjourné en Afrique expliquait quelque chose qui rejoint la remarque de Renaud Camus. Les animistes approchés par les deux grandes religions mondiales se voient offrir deux options : soit un Dieu et trois femmes, soit trois dieux (ou ce qui est perçu comme tel quand on ignore le mystère de la Trinité) et une seule femme. Voilà une des raisons du succès de l'islam. Raison assez peu spirituelle, mais qui ne signifie pas qu'il n'y aurait pas de personnages spirituels dans cette religion : ils y sont seulement très marginaux, car ceux qui y ont l'autorité sont les légistes (les cadis, les muftis, les ayatollahs, les mollahs - tous habilités à prononcer des "fatwas" (décisions juridiques)).
Le monothéisme qu'est l'islam n'est plus rigoureux qu'à la faveur d'un éloignement et d'une altérité radicale de Dieu. Ce qui rend Dieu proche aux chrétiens, c'est la Trinité : en s'incarnant dans la personne du Fils, Dieu fait l'expérience de la finitude humaine, de la faiblesse, de la tentation et peut nous pardonner et nous racheter - rachat impossible de la part d'un Dieu qui ignore l'expérience de la peccabilité et de la faiblesse. Le Fils s'étant retiré, Dieu envoie le Saint-Esprit pour continuer de nous guider.
Ces trois personnes sont peuvent se comprendre comme les trois états de l'eau, qui peut être aussi bien liquide que solide ou gazeuse. C'est la même substance sous trois formes différentes, avec donc des qualités différentes. Cette comparaison n'est évidemment pas raison.
Dans l'islam, le fait qu'on doive ignorer le dernier nom de Dieu - et donc que les 99 autres ne soient que des pis-allers - signale l'extrême séparation des hommes d'avec Allah. Avérroès avait tiré une partie des conséquence de cette distance, et son Dieu était si lointain qu'à l'Âge classique "averroéisme" était presque synonyme d'athéisme - accusation qui visa Spinoza, par exemple.